Crêpes et galettes

S’il fallait retenir un seul symbole de la gastronomie bretonne, ce serait sans aucun doute les crêpes ! Un séjour en Bretagne n’est pas complet sans le passage par la case crêperie et on ne compte plus les crêperies ouvertes en dehors de Bretagne par la diaspora bretonne (j’ai même vu une crêperie bretonne à Montréal au Québec !).

Crêpe ou galette ?

Lorsque j’ai quitté mon pays natal lorientais pour partir étudier à Rennes, quelle ne fut ma surprise de découvrir l’étrange nom dont les rennais affublaient ce que j’avais toujours appelé une crêpe : la galette ! Alors crêpe ou galette ? En fait c’est une question de géographie et plus précisément de zone linguistique, avec d’un côté la Basse-Bretagne et de l’autre la Haute-Bretagne. La Basse-Bretagne désigne la partie bretonnante (c’est-à-dire de langue bretonne) de la Bretagne et s’étend grossièrement à l’ouest d’une ligne Saint-Brieuc – Vannes. La Haute-Bretagne désigne la partie de Bretagne dans laquelle la langue parlée était le gallo, à l’est de cette même ligne Saint-Brieuc – Vannes. En fait en Basse-Bretagne comme en Haute-Bretagne, il n’y a que deux types de crêpes : les crêpes salées, à base de farine de blé noir (aussi appelé sarrasin), et les crêpes sucrées, à base de farine de froment. D’ailleurs en Basse-Bretagne on parle bien de crêpes de blé noir et de crêpes de froment. Mais les hauts-bretons ont voulu compliquer les choses en affublant les crêpes de blé noir du nom de galette alors que les crêpes de froment s’appellent simplement … crêpes ! Les choses se compliquent quand on sait que le terme galette en Basse-Bretagne désigne autre chose : une crêpe de froment plus épaisse (en fait semblable à un blini, mais en moins épais), légèrement croustillante à l’extérieur, moelleuse à l’intérieur, à laquelle on mélange parfois des petits morceaux de pommes (un vrai régal !) ou de pommes de terre. Ou encore de délicieux biscuits pur beurre (les fameuses galettes de Pont-Aven !). Alors qui a raison entre les hauts-bretons et les bas-bretons ? Je ferai simplement remarquer que la capitale de la crêpe (qui accueille tous les ans la Fête de la Crêpe) est Gourin … en Basse-Bretagne !

La galette saucisse

Dans une partie de la Haute-Bretagne, plus précisément Rennes et l’est de l’Ille-et-Vilaine, il existe une recette populaire incontournable dans les kermesses, les festivals, les marchés, les rencontres sportives … et les manifestations de la CGT : la galette-saucisse. Tout simplement une grosse saucisse de porc bien chaude enroulée dans une galette (crêpe de blé noir donc !) froide, le tout mangé à la main, sans chichi ! La galette-saucisse est parfois surnommée le hot-dog breton ! La galette-saucisse est en particulier incontournable lors des rencontres de football du Stade Rennais où elle est vendue partout autour du stade. Il se murmure même que la galette-saucisse a plus fait pour la renommée du Stade de la Route de Lorient que l’équipe de football locale … Les supporters rennais entonnent régulièrement des chants à la gloire de la galette-saucisse ! Le hot-dog breton a même son association de défense et de promotion, la SGSB, association pour la Sauvegarde de la Galette-Saucisse Bretonne !

Préparer et manger des crêpes ?

Cuisiner des crêpes débute par la préparation de la pâte à crêpe. Il existe de nombreuses variantes de recettes : avec ou sans oeufs, avec du lait ou de l’eau, avec un mélange de farine de froment et de blé noir, …

Exemple de recette pour des crêpes de blé noir (environ 15 crêpes) :

• 300 grammes de farine de sarrasin
• Du sel
• De l’eau.

Dans un saladier contenant la farine, on rajoute le sel puis l’eau petit à petit en continuant à mélanger jusqu’à ce que la pâte soit fluide et lisse.

Exemple de recette pour des crêpes de froment (environ 15 crêpes) :

• 250 grammes de farine de froment
• 125 grammes de sucre
• 1 pincée de sel
• 2 à 3 œufs entiers
• 50 à 60 cl de lait

Dans un saladier, verser la farine, le sucre et le sel, creuser un puits et y casser les œufs. Puis mélanger et verser progressivement le lait jusqu’à ce que la pâte soit lisse. Certains coupent le lait avec de l’eau, de la bière, du cidre, rajoutent un soupçon de rhum, de fleur d’oranger, de beurre ou de miel.

Après avoir laissé reposer la pâte (au moins une heure), place à la cuisson ! À la maison, une poêle plate anti-adhésive suffira. Mais le nec plus ultra est, comme les professionnels, d’utiliser un billig (aussi appelé crêpière), une plaque de fonte de 33 à 50 centimètres de diamètre chauffée au gaz ou à l’électricité. Réussir une crêpe demande un peu d’entraînement car il faut prendre le coup de main : on graisse d’abord le billig (traditionnellement avec du lardiguel, un mélange composé d’un jaune d’œuf et de saindoux), puis on verse un peu de pâte sur le billig avec une louche et on l’étale de manière circulaire à l’aide d’un râteau en bois appelé rozell. On décolle ensuite la crêpe à l’aide d’une spatule appelée spanell, éventuellement pour retourner la crêpe et la cuire l’autre côté (même si ce n’est pas utile quand on rajoute des garnitures).

Mais plutôt que de longs discours, rien de tel qu’une petite vidéo de démonstration !

Les crêpes peuvent se déguster nature, avec un peu de beurre fondu bien sûr ! Mais le plus souvent on les agrémente de garnitures pour en faire un vrai repas. Un repas de crêpes commence toujours par les crêpes de blé noir, les salées. Le grand classique est de les garnir de jambon, de fromage râpé ou d’œuf (miroir ou brouillé). Une crêpe comprenant ces 3 garnitures est appelée une complète. Mais toutes les crêperies proposent des recettes plus originales : noix de Saint-Jacques, saucisse de Morteau, champignons, andouilles, … Les crêpes de froment, les sucrées, se consomment au dessert (ainsi qu’au petit déjeuner et au goûter !). Là aussi les recettes classiques (sucre, citron, chocolat, confiture, pommes, banane, …) côtoient des recettes plus élaborées (pomme et caramel au beurre salé, flambée au calvados, au rhum ou au grand marnier, crêpe au Nutella, …). Les crêpes s’accompagnent le plus souvent de cidre (et le bon cidre fait souvent la bonne crêperie !) ou de lait ribot.

Trouver une bonne crêperie

Si vous voulez manger des crêpes lors de votre séjour en Bretagne, vous n’aurez que l’embarras du choix tant les crêperies sont nombreuses. Mais le business étant rentable, il attire des restaurateurs appâtés par le gain facile et pas toujours à la hauteur sur le plan culinaire (souvenir de crêpes réchauffées à la poêle dans une crêperie, qui n’est d’ailleurs pas restée ouverte longtemps !). Il n’y a pas de règles absolues pour reconnaître une bonne crêperie bretonne, mais en général le bon sens incite à se méfier des crêperies situées dans les zones les plus touristiques (qui en plus sont les plus chères !) et de celles qui en plus de faire des crêpes font aussi des salades, des pizzas, etc … Le meilleur moyen de trouver la bonne crêperie du coin est tout simplement de demander aux locaux. Tout breton digne de ce nom connaît les bonnes adresses de sa ville pour manger des crêpes ! Par expérience, je n’ai jamais non plus été déçu par les crêperies affichant le label « Bonnes Crêperies de Bretagne » ou « Crêperies Gourmandes de Bretagne ».

Quelques crêperies que je vous recommande ou qu’on m’a recommandé. Si vous avez de bonnes adresses, n’hésitez pas à me les communiquer !

Ville	Crêperie	Commentaire
Clohars-Carnoët (29)	Crêperie Saint-Maurice	De bonnes crêpes dans un cadre naturel superbe, au bord de l’anse Saint-Maurice sur la Laïta. Réservation fortement recommandée l’été ! Plus d’infos : www.creperiedesaintmaurice.com.
Clohars-Carnoët (29)	Crêperie la Goélette	Située à Doëlan rive droite, au calme. On compose sa crêpe ou on choisit parmi de délicieuses recettes toutes faites. Les crêpes sont bonnes et l’accueil très chaleureux. Demander la terrasse donnant sur la rivière (s’il y a de la place).
Saint-Nic (29)	Crêperie de Kervengard / Au soleil breton	Située sur la plage de Pentrez. La patronne, Bernadette, est également formatrice, transmettant ainsi son savoir-faire. Plus d’infos : www.ausoleilbreton.com.
Locquénolé (29)	L’Excalibur	Crêperie située entre Morlaix et Carantec. Voir ici : www.creperie-pub-excalibur.fr. Suggestion de Dévrig.
Brest (29)	Crêperie du roi Gradlon	Petite crêperie dans le centre de Brest et de très bonnes crêpes. C’est la crêperie que les brestois recommandent ! Réservation fortement recommandée.
Brandivy (56)	Crêperie du puits	Très bonnes crêpes (surtout blé noir, les froments ne sont en général pas assez cuites si on ne précise pas). C’est la même famille qui tient la crêperie depuis au moins 20 ans. Tarifs abordables. Les principaux inconvénients : souvent beaucoup de monde l’été (malgré une centaine de places, il n’est pas rare qu’il y ait de la queue à l’entrée) ce qui donne un peu un côté usine. Coin un peu pommé à l’écart des grands axes. Il y a marqué « galette de blé noir » alors que ce sont bien des crêpes très fines. (suggestion de Fred)
Lorient (56)	La Rozell	Crêpes moins bonnes que dans la précédente mais crêperie situé en centre-ville. Une seule salle assez petite avec des photos, croquis et plan du Lorient d’avant-guerre. De la documentation sur l’histoire des crêpes en Bretagne, la différence crêpe / galette suivant la zone, … Réservation obligatoire (ou au moins fortement conseillée) et tarifs corrects. (suggestion de Fred)
Guidel (56)	La Laïta	Toute petite crêperie située à Kerbrest, un hameau au-dessus de Guidel-Plages avec vue sur l’anse du Pouldu et la Laïta. Cadre agréable, cidre local et crêpes délicieuses. Réservation indispensable l’été !
Nantes (44)	Heb Ken	Crêperie située près de la place Royale. Décor très simple mais bon accueil et crêpes délicieuses. Plus d’infos : www.heb-ken.fr.
Nantes (44)	Au vieux Quimper	Crêperie située dans le quartier du Bouffay, dans une des rares maisons à colombages de Nantes. Cadre sympa et quelques tables en terrasse.
Nantes (44)	Ker Breizh	Toute petite crêperie située dans une ruelle près du cours Cambronne. Crêpes délicieuses, les meilleures de Nantes pour moi !