Clisson, l’Italie en Bretagne
Comme le chanteur breton Gilles Servat le rappelle dans sa célèbre Blanche Hermine, Clisson est bien bretonne (“La voilà la Blanche Hermine / Vive la mouette et l’ajonc / La voilà la Blanche Hermine / Vive Fougères et Clisson”). Pourtant il faut bien avouer que lorsqu’on se promène dans les rues de Clisson, on a beaucoup de mal à se sentir en Bretagne. Beaucoup de mal également à se sentir en France. On se sentirait plutôt … en Italie ! Avec ses ruelles étroites, ses toits de tuile, ses villas, ses cyprès et ses rives romantiques, Clisson a des airs indéniables de Toscane qui lui ont valu le surnom de “Clisson l’Italienne” et en font une des villes les plus étonnantes et les plus séduisantes de Bretagne.
Histoire de Clisson
L’Histoire de la ville s’est longtemps confondue avec celle des seigneurs de Clisson, une des familles les plus puissantes du Duché de Bretagne. Les premières mentions de la famille remontent à 1040 avec Guy de Clisson qui fait bâtir une tour en bois sur un éperon rocheux dominant la vallée. C’est Guillaume de Clisson, au 13ème siècle, qui construit le château actuel. Du 13ème au 15ème siècle, la famille Clisson s’illustre dans les guerres incessantes entre l’Angleterre (souvent alliée à la Bretagne) et la France, choisissant un camp ou l’autre selon ses intérêts. Ainsi le plus célèbre membre de la famille, Olivier V de Clisson, est d’abord allié des anglais et du duc de Bretagne, Jean de Montfort, de 1357 à 1369. Il faut dire que son père Olivier IV avait été décapité par le Roi de France pour avoir intrigué avec le roi Edouard III d’Angleterre … Mais s’estimant mal payé de ses services, il passe dans le camp des français et se range aux côtés de Duguesclin auquel il succède en tant que Connétable de France en 1380. Sa cruauté est telle qu’on le surnomme “Le boucher” … Rejeté par les français, il se réconcilie avec le Duc de Bretagne un peu avant sa mort au château de Josselin (Morbihan) en 1407. Mais la trahison de sa fille Marie la Boiteuse amènera le Duc de Bretagne à confisquer en 1420 les biens de la famille, en particulier le château de Clisson, mettant fin à la dynastie des Clisson.
Le duché de Bretagne agrandit et fortifie le château qui s’intègre alors dans la ligne de défense frontalière entre la Bretagne et la France, qu’on appelle souvent Marches de Bretagne. Le château devient la résidence préférée du Duc François II de Bretagne qui y séjourne régulièrement. La position de ville frontière de Clisson, au carrefour de la Bretagne, de l’Anjou et du Poitou, génère une activité commerçante intense qui fait la fortune de la ville. Après la défaite des ducs de Bretagne en 1488 à Saint-Aubin-du-Cormier et la fin de l’indépendance bretonne, Clisson perd son rôle de forteresse (hormis pendant la période des guerres de religion). Mais l’aménagement de moulins à farine, de moulins à papier, de filatures, d’industries métallurgiques et la culture du muscadet continuent d’assurer la richesse de la ville.
Mais la ville va payer un lourd tribut lors de la Révolution Française … Au cœur du conflit de la Guerre de Vendée, Clisson est envahie tantôt par les troupes royalistes, tantôt par les troupes républicaines. Après la victoire des royalistes à Torfou, la ville est incendiée par les troupes républicaines en 1793 puis subit les atrocités des Colonnes Infernales du général Turreau après la victoire des républicains. Devenue un champ de ruines, la ville est abandonnée par ses habitants pendant plusieurs années …
En 1797 les frères Cacault, Pierre (peintre) et François (diplomate), originaires de Nantes, qui ont fui l’Italie et ses émeutes anti-républicaines, tombent sous le charme de Clisson et de sa vallée et s’y installent. Ils y créent un musée et décident de promouvoir le site auprès des artistes. Le sculpteur François-Frédéric Lemot en fait partie ; il tombe lui aussi sous le charme de cette région qui lui rappelle la campagne autour de Tivoli et rachète en 1805 le domaine de La Garenne pour le remodeler en profondeur sur le modèle de Tivoli. La reconstruction de Clisson sur le modèle Toscan débute, aidé par des architectes de renom comme Mathurin Crucy, Pierre-Louis Van Cleemputte ou Joseph Gautret. Ce sont ces hommes qui sont à l’origine de cette étonnante architecture italianisante qu’on peut admirer à Clisson et dans sa vallée !
Visiter la ville
Pour découvrir la ville, je vous propose un petit circuit sur lequel vous pourrez user vos semelles en découvrant tous les charmes de Clisson.
- Départ du parking du domaine de La Garenne – Lemot. Le sculpteur Frédéric Lemot rachète en 1805 cette ancienne réserve de chasse des seigneurs de Clisson pour la transformer en parc s’inspirant de la ville italienne de Tivoli, source d’inspiration de nombreux artistes comme Turner ou Poussin.
- A quelques mètres du parking, la Maison du Jardinier (réalisée entre 1811 et 1815) garde l’entrée du domaine. Cette belle maison de brique rouge surplombée d’un colombier carré était la première demeure italianisante du Pays de Clisson. A l’intérieur une exposition sur l’Histoire de Clisson et son architecture.
- Une belle et large allée agrémentée de sculptures mène ensuite à la Villa Lemot, édifiée en 1824 par l’architecte Pierre-Louis Van Cleemputte. Côté parc, la façade de la villa est précédée d’un superbe péristyle à colonnades de granite, d’une cour et d’un porche. A l’arrière de la villa, une terrasse domine la vallée et découvre une belle vue sur Clisson. La Villa Lemot est jumelée depuis 1990 avec la Villa Médicis et expose à ce titre régulièrement des œuvres des pensionnaires de la Villa Médicis.
- Quittons la villa pour nous diriger vers le rond-point de Diane, par une belle allée bordée d’arbres, puis vers le temple de Vesta (inspiré du temple homonyme de Tivoli) qui domine la vallée et la Sèvre Nantaise. Une belle balade au milieu des pins parasols, des platanes, des tilleuls, des marronniers, des acacias, … Le chemin descend ensuite vers les rives de la Sèvre Nantaise puis suit le cours de la rivière. Sur l’autre rive, on voit les anciens moulins et manufactures qui firent la richesse de Clisson au 18ème siècle. On quitte le domaine de la Garenne – Lemot par une allée couverte.
- Prendre à gauche à la sortie du parc. On traverse la Moine par le pont Saint-Antoine. A droite belle vue sur la rivière bordée de saules pleureurs, avec au loin la belle silhouette du viaduc. A gauche, toujours des saules pleureurs et la Sèvre Nantaise dominée par le château. Un peu plus loin, face à un marchand de glace, remarquez au mur la hauteur de la crue record … Vertigineux !
- On prend ensuite à gauche pour traverser la Sèvre Nantaise sur le Pont de la Vallée. Belle vue de part et d’autres. En amont, sur la gauche un ancien moulin, le Moulin du Château. Sur la droite l’impressionnant château de Clisson domine la rivière. En aval, paysage très romantique avec la rivière bordée d’arbres et dominée par la ville dont émerge le clocher de l’église Notre-Dame.
- Après le pont, remonter vers la droite puis prendre à gauche la rue Tire-Jarrets qui, comme son nom l’indique, monte raide vers l’église Notre-Dame. Cette église de style néo-romane a été construite entre 1887 et 1888 sur les ruines de l’ancienne église détruite par le feu pendant les Guerres de Vendée. Son architecte, le nantais René Ménard, s’est inspiré de l’église Saint-Jean et Saint-Paul de Rome. Autant dire que l’église s’intègre parfaitement dans son environnement lui aussi inspiré de l’Italie. L’intérieur de l’église est émouvant de simplicité.
- Juste à côté de l’église, on trouve un peu d’ombre (souvenez-vous qu’on est en Italie, et en Italie le soleil cogne !) sous les très belles Halles de Clisson, avec une immense toiture soutenue par une charpente du 15ème siècle. C’est un des rares bâtiments de Clisson à avoir échappé à l’incendie qui a ravagé Clisson en 1793. L’endroit idéal pour manger quelques crêpes ou se rafraîchir à la terrasse d’un bar.
- A gauche, les halles s’ouvrent sur une rue au bout de laquelle on rejoint le château de Clisson. On peut alors prendre à gauche et rejoindre les bords de la Sèvre Nantaise en descendant un escalier à pic surnomme “l’échelle du château”. Mais on peut aussi prendre à droite pour contourner le château et l’admirer par son autre façade, avec en prime une superbe vue sur la ville et la vallée. Le château de Clisson a été construit par Guillaume de Clisson au 13ème siècle et a été fortifié au fil des siècles, ce qui en fait un véritable catalogue de l’architecture militaire en France du 13ème au 18ème siècle. Le château peut se visiter.
- Au pied des escaliers qui descendent dans la fosse entourant le château, un sentier permet de rejoindre les bords de la Sèvre Nantaise. On peut prendre à gauche pour rejoindre le Pont de la Vallée, ou prendre en face dans un jardin d’enfants puis longer la rivière vers la droite. Une très belle promenade au bord de la Sèvre Nantaise, dans un environnement ombragé très romantique et qui permet de rejoindre deux anciens moulins : le joli moulin du Plessard, transformé en gîte rural et en base de canoë-kayak ; et plus loin le moulin de La Feuillée, où fut filmée et produite dans les années 60 et 70 la série “Le Manège enchanté” imaginé par le nantais Serge Danot. Tournicoti … Tournicoton …
- Retour vers le centre-ville en revenant sur nos pas le long de la rivière. Traversée du Pont de la Vallée puis on continue tout droit dans la rue qui grimpe jusqu’au viaduc. En face, l’église de la Trinité et le couvent qui lui est accolé dominent le domaine La Garenne – Valentin, jardins en terrasse qui descendent vers la Moine.
- Après avoir traversé le viaduc (très belle vue sur la ville), on continue tout droit pour rejoindre le parking de La Garenne – Lemot. Fin de la visite !
1 réponse
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